Connaissez-vous le cognac ?
La semaine dernière, j'ai passé 4 jours à Cognac directement sur l'exploitation de Jean et Amy Pasquet de la distillerie Jean-Luc Pasquet. L'occasion pour moi de vous parler de ce spiritueux mythique.
Cognac, tout le monde connaît. La faute à Hennessy du groupe LVMH (H pour Hennessy) et son marketing surpuissant qui a su rendre célèbre cette eau-de-vie charentaise.
Cette newsletter n’est pas là pour vous raconter l’histoire du cognac depuis ses débuts, c’est très intéressant mais Wikipédia fait très bien le travail. Quelques petites anecdotes liées à mon voyage seront bien plus divertissantes.
Le cognac est une eau-de-vie de vin. Pour vulgariser, pour faire du cognac il faut avoir des vignes sur les crus correspondant à ceux de l’appellation Cognac (carte ci-dessous). Avec ces raisins, on fait du vin que l’on va ensuite distiller et faire vieillir au moins 2 ans en fût pour avoir un VS, Very Special. Avant ces 2 ans, on ne peut pas appeler ça cognac, c’est une eau-de-vie de vin ou Brandy pour le reste du monde.
Pendant ces quatre jours, j’ai visité trois distilleries et un négociant.
Quelle est la différences entre les deux ? La distillerie a un alambic et distille tandis que le négociant sélectionne et achète des fûts chez d’autres et fait valoir sa qualité en matière de sélection et de maîtrise du vieillissement.
J’ai commencé par la distillerie Tesseron à Châteauneuf-sur-Charente, qui était un ancien négociant mais qui a, depuis quelques années, sa propre marque et ses alambics. Cette maison possède un Paradis exceptionnel. Le Paradis désigne le lieu de stockage des plus vieilles eaux-de-vie. Des lots du 19e siècle, c’était un moment exceptionnel, un véritable voyage dans le temps.
Cette maison distille pour elle-même mais aussi pour d’autres. L’occasion pour moi de vous expliquer un fonctionnement peu connu par le grand public et les consommateurs. Un vigneron à cognac ne possède pas forcément d’alambic mais il doit fournir une eau-de-vie respectant un certain cahier des charges pour vendre son produit aux grandes marques que sont Hennessy, Remy Martin et Martell. Les maisons qui ont des alambics vont donc distiller pour ces vignerons et directement envoyer le résultat de la distillation au client final qui est dans 99% du temps (pourcentage sorti de mon chapeau) l’une des ces trois grandes marques. C’est un système bien huilé qui permet à tout le monde de travailler de manière différente. Si un vigneron veut faire sa marque de cognac, il peut prendre les risques de le faire mais il peut aussi s’assurer un bon revenu en cultivant pour les grandes maisons.
La deuxième distillerie visitée fut celle de Lheraud qui est connue pour faire des cognacs millésimés ce qui n’est pas une mince affaire. Je vous explique.
Pour faire un cognac millésimé, il faut un cahier de chai très précis et une surveillance permanente des autorités pour attester de la véracité de vos propos.
Les fûts sont scellés (voir photo ci-dessous) par les autorités pour être sûr que le propriétaire ne rajoute pas du cognac d’une autre années, souvent plus jeune, dans le fût et vende le tout plus cher. Ce contrôle très pesant permet donc de conserver la réputation des cognacs millésimés mais fait aussi leur rareté.
Chaque année, les propriétaires doivent relever, au centilitre près, les niveaux d’alcool qu’ils possèdent. Ils sont donc obligés de solliciter les autorités puisqu’ils vont devoir ouvrir les fûts scellés. L’ouverture se fait donc en présence de tout le monde, ils mesurent les niveaux d’alcool et en profite pour goûter le produit. S’ils veulent le garder en vieillissement pour faire un millésime, le fût est refermé et re scellé par les autorités. S’ils décident que le produit est prêt à être embouteillé, il vide le fût et l’embouteille toujours en présence des autorités. S’ils décident de mélanger le fût avec d’autres parce que la qualité n’est pas au rendez-vous, il est déclassé et donc ne sera plus scellé.
Ce processus se répète chaque année et il faut mobiliser les autorités à 180€ HT de l’heure environ à chaque fois. C’est aussi pour ça que les cognacs millésimés sont rares et chers.
J’ai ensuite visité sur ma dernière journée la distillerie des Pasquet et la maison de négoce Grosprerrin. L’occasion pour moi de faire la promo de la nouvelle chambre d’hôtes des Pasquet. Vous pouvez dormir au milieu des vignes, visiter la distillerie et découvrir ce merveilleux monde qu’est le cognac !
Grosperrin est donc ce qu’on appelle un négociant, il achète des fûts et les embouteille sous sa marque. Ce métier est souvent assez peu connu des consommateurs. Souvent, lorsque je parle des embouteilleurs ou des négociants, les personnes qui ne sont pas au fait du milieu des spiritueux pensent que c’est un peu un job d’arnaqueur et que seuls ceux qui ont la matière première, l’alambic et la marque ont de la valeur.
Les négociants et les embouteilleurs ont un rôle bien précis, ils sélectionnent et vendent, ils permettent aux producteurs qui ne veulent pas avoir de marque de gagner de l’argent et aux clients qui cherchent des produits nouveaux ou originaux d’en avoir rapidement sans que les marques se décident à en commercialiser. Ce n’est donc pas un job de profiteur, il permet de mettre de la flexibilité dans le marché.
Je sais de quoi je parle puisqu’avec De Michellot, je suis moi-même embouteilleur. Même si les recettes des liqueurs ne sont utilisées que pour la marque De Michellot, nous n’avons pas d’alambic et c’est une autre distillerie qui les produit pour nous. Cette pratique nous a permis de nous lancer plus rapidement sans avoir a monter toute une distillerie et recruter des employés. Cela a aussi permis de faire gagner de l’argent à une distillerie qui produit pour nous sans avoir besoin de commercialiser elle-même le produit final. Si vous voulez acheter mes liqueurs de gentiane ou de génépi, cliquez sur le lien juste ici 😁
Les négociants participent aussi au prolongement de la mémoire des maisons de coganc. La maison Grosperrin, avec cette cloche qu’elle fait sonner quotidiennement, honore la mémoire des producteurs disparus dont ils détiennent les fûts et qu’ils ont “sauvé” en leur évitant de finir dans les immenses assemblages des grandes maisons. Cette tradition en interne m’a beaucoup touchée.
Nous allons finir ce voyage par un conseil culinaire en vous donnant l’adresse d’un restaurtant à ne surtout pas rater dans le coin, le fameux Graines et Garenne, restaurant sur lequel j’ai fait une vidéo. Tenu par un chef qui a fait de très grands établissements, la carte est courte, composée uniquement de produits frais, de saison et elle change midi et soir ce qui est absolument DINGUE ! Je me suis régalé !
Vous pouvez la retrouver sur mon Mapstr en cliquant sur ce lien 😁
Merci pour votre temps et passez une bonne semaine, je vous embrasse !
Génial, superbement écrit et très intéressant.